Toponymie :

 

Le Mounier a longtemps été, jusqu’en 1950, appelé Monnier, nom dérivé de Mons Niger, soit Mont Noir, pour sa couleur. En remontant même plus loin, de vieilles cartes militaires de l’Etat Major le nommaient Meunier, en raison de la lente fonte des neiges, le laissant blanc, comme un meunier. Plutôt marrant pour un Mont Noir !

Au final, le nom Mounier ne serait qu’une déformation de l’orthographe au fil des années, pourquoi pas du à une erreur de copiste ou d’imprimeur, le U et le N étant interchangeables.

 

Quelques infos :

 

  • La première ascension du Mont Mounier a été réalisée en 1803, par un naturaliste niçois, Mr RISSO.
  • Depuis 1868, le Mont appartient à la commune de Roubion, acheté contre 60 000 francs payés moitié en pièce et l’autre en bois à Mr Maurice POURCHIER.
  • Elle devint la montagne la plus célèbre du comté de Nice, étant souvent cités par les géographes et savants du 19e
  • Dans les années 1850, des visites touristiques débutent, accrues par la création du Club Alpin Français. Sa renommée ne fera qu’augmenter avec la création, un demi-siècle plus tard, d’un Observatoire.

 

L’observatoire :

 

Le Mont Mounier présentait un intérêt scientifique, ou plutôt astronomique et météorologique que l’Observatoire de Nice n’a pas négligé. En 1893, l’Observatoire de Nice envisagea la création d’un observatoire sur cette montagne. A cette époque, il sera donc le 3e en altitude, après celui du Mont Blanc et du Pic du Midi. Les scientifiques avaient une réelle volonté de s’écarter des villes, polluées par différentes perturbations extérieures.

La commune de Roubion céda donc du terrain sur le Mounier au député, Mr Bischoffsheim, meneur du projet. Pour l’occasion, un sentier fut tracé, depuis Beuil, pour acheminer les matériaux sur le plateau. C’est un sentier plus large et donc plus facile que ceux existant déjà. Il part du Col des Moulinés jusqu’au Démant, au lieu-dit « Tartari » puis suit le Col de Crousette via de nombreux lacets. C’est d’ailleurs désormais un des chemins balisés qui mène au Mounier. Un abri au Tartari, fait de quelques pierres, fut érigé pour abriter les travailleurs en cas de tempêtes. C’est un entrepreneur de Roubion qui se chargea du travail du bois sur le chantier. Une main d’œuvre bien locale !

Fin de l’été 1893, les travaux sont achevés. L’observatoire compte trois bâtiments (une maison d’habitation, un dépôt et un atelier de forge) ainsi qu’une coupole. Le tout est relié par des galeries. Une citerne est également présente. Mr de Cessole, celui qui fera connaître le Mounier d’un point de vue touristique, ne trouva jamais l’existence de la source l’alimentant, pensant qu’il s’agissait plutôt d’une autre, naissant dans la prairie de Sallevielle. Cependant, un berger le contredit, affirmant l’existence d’une source, à quelques mètres sous la cime du Mounier. Cette citerne existe toujours. En 1938, le CAF (Club Alpin Français) y fit sceller des barreaux pour descendre et installer une poulie. Un écrit datant de la Seconde Guerre Mondiale relate également qu’un soldat y aurait percé la glace la recouvrant pour boire le pastis avec le gardien du Refuge.

Source : Revue du CAF

Pour en revenir à 1893, un malheur s’y déroula en décembre de cette même année. Un incendie dévasta la maison d’habitation, la rendant…inhabitable. Les personnes présentes ce jour-là ne purent rien faire pour combattre le désastre qui se jouait devant leurs yeux. Ils attendirent la fin de l’incendie pour constater les tristes dégâts. La source du sinistre serait le tuyau du poêle à charbon qui mis feu aux boiseries. Le jour même, les sinistrés redescendirent au village, n’ayant plus d’abris pour rester sur place.

Mr Bischoffsheim entreprit rapidement la reconstruction du site. Le bois fut oublié et ils passèrent à la maçonnerie. Quelques améliorations sont également apportées, comme :

  • La solidification de la coupole qui s’était déjà envolée à cause des conditions climatiques difficiles.
  • Le téléphone ! Relié au Beuil ! Aujourd’hui, quelques traces de poteaux électriques sont encore visibles. Le but était de permettre à Mr MAYNARD, le gardien des bâtiments, d’y rester toute l’année pour transmettre ses observations météorologiques journalières au Bureau Central de Météorologie de Paris. A partir de 1897, les relevés météorologiques furent publier dans la Revue Alpine du CAF mais aussi dans diverses revues et journaux scientifiques nationaux.

Source : Revue du CAF

L’observatoire a permis à des scientifiques de venir y faire des recherches, notamment Mr PERROTIN, le directeur de l’Observatoire de Nice, qui, au début de l’été 1895, étudiait Vénus, lui permettant par la suite de confirmer des hypothèses de l’époque. De beaux phénomènes astronomiques y ont également été observés ! Comme le phénomène du spectre, un matin de févier 1896, par De Cessole en personne, sur la pointe sommitale.

Tous les scientifiques s’accordaient à la dire. Derrière le but premier de la création de cet observatoire, le lieu était merveilleux, emprunt à la poésie.

Source : Revue du CAF

Mr Joséphin MAYNARD, le gardien et membre de l’équipe de l’Observatoire de Nice, était, comme dit précédemment, en plus de faire des relevés, chargé de surveiller et d’entretenir les lieux.

Parfois, l’hiver, la neige pouvait atteindre les 5m. Mais, dans son « igloo », il était parfaitement protégé et confortablement installé. Le record d’enneigement au Mounier fut atteint sur les hivers 1901-1902 et 1902-1903 où les cumuls ont atteint pas loin de 12,5m.

Source : Revue du CAF

Pour se chauffer, il utilisait de la tourbe, présente sur le flanc nord du Mounier. Cela brulait facilement, mélangé à du bois ou du charbon, sans flammes. Cette ressource naturellement présente permettait d’éviter des allers-retours pour du bois ou du charbon. Ce gisement de tourbe abondant étonnait d’ailleurs De Cessole car cette ressource se trouve ordinairement en fond de vallée.

Maynard a vécu seul, avec son chien, durant 25 années. Il accueillait également les randonneurs. Comme Mr de CESSOLE, il promut le développement du tourisme montagnard. Accroché à cette idée, lorsqu’il redescendait chez lui, au Beuil, il prenait des clichés pour en faire des cartes postales qu’il vendait ensuite au refuge. Quelle jolie spécificité qui vient compléter les atouts de cet Observatoire !

Mr Maynard !
Source : Revue du CAF

Parallèlement à Maynard donc, Mr de Cessole (scientifique, botaniste, photographe, philanthrope, naturaliste, alpiniste et président du CAF de Nice de 1900 à 1932), était également enclin à promouvoir ce merveilleux site et le rendre accessible. Sous l’influence des deux, en 1896, c’est la cime la plus visitée du département (123 touristes s’y rendirent cet été là). De Cessole ne manquait pas d’idée ni d’imagination pour faciliter l’accès et a même envisagé un temps la création d’un relais hôtel non loin de l’Observatoire ainsi qu’une pharmacie. Deux guides muletiers du CAF furent attitrés au Beuil. Un registre était tenu à l’observatoire, témoignant de l’augmentation des visiteurs.

Le 31 juillet 1910, un second incendie se déclencha, détruisant la coupole. Les observations astronomiques furent suspendues, seules les météorologiques continuèrent. L’observatoire, par legs, appartenait désormais à l’Université de Paris, tout comme celui de Nice. Les projets de reconstructions furent abandonnés en 1918 et les lieux restèrent en ruines. La lunette aurait été apporté au Pic du Midi selon les habitants du Beuil.

Les vestiges furent délégués au Club Alpin pour en faire un Refuge d’une vingtaine de personnes. L’ancienne maison de MAYNARD, décédé en 1919, devint donc un refuge alpin, inauguré le 15 juillet 1928. C’est l’un de ses fils qui reprit le gardiennage.

Cette reconversion officielle en Refuge, dans un milieu si hostile, fut une véritable innovation pour l’époque, tout comme la notion même de Refuge Alpin soit dit en passant. Le refuge restera en activité jusqu’en 1940, abandonné pour des raisons climatiques.

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